Dispositif du Lascar – Suivi après 5 ans de la régénération en pin blanc. Rapport 2018-09. 48 p. + 1 annexe.

Dans la région de l’Outaouais, comme dans d’autres régions au Québec, la régénération du PIB s’avère difficile, en lien avec la disparition des feux de forêt et les difficultés de reboisement du pin blanc dû à la présence de la rouille vésiculeuse. Or, la région a entrepris un virage dans sa nouvelle stratégie régionale de production de bois, également pour des fins de restauration de la biodiversité. Selon un récent projet (Lessard et al., 2018), l’un des principaux axes de la stratégie d’aménagement pour l’augmentation de la résistance des forêts aux changements climatiques devrait être l’instauration d’une succession assistée du pin blanc.

Dans ce contexte à la fois de raréfaction, de baisses de possibilités du pin blanc et de difficultés sylvicoles à le régénérer, un projet de recherche a été initié en 2004 en Outaouais, près de Fort-Coulonge (Secteur Alexandre). Le présent projet réalisé dans le secteur Lascar près de Maniwaki en 2009 vise la poursuite du développement d’une stratégie alternative permettant de pallier la problématique de régénération du pin blanc. Dans un peuplement de 100 ans dominé par le pin blanc et évoluant actuellement vers des essences tolérantes de faible valeur (sous-couvert), un dispositif expérimental compare trois traitements sylvicoles soit : la coupe progressive uniforme (CPU), l’éclaircie commerciale de feuillus et de pins (ECF) et l’éclaircie commerciale de feuillus et de pins modifiée (ECFm).

Inspirée des travaux réalisés en Ontario, la CPU maintient un couvert d’espèces dominantes bien espacées avec l’intention de créer une abondante régénération de pin blanc sur toute la superficie. L’ECF, traitement habituellement prescrit au Québec pour ce type de situation, a pour objectif d’accélérer la croissance du diamètre des arbres résiduels; elle peut avoir comme effet accessoire d’installer la régénération en essences désirées. Enfin, l’ECFm découle d’une mauvaise transmission des consignes qui a fait en sorte de conserver uniquement les tiges martelées positivement, bien espacées. Ainsi transformée, cette intervention peut, en principe, être assimilée à un procédé de régénération par coupes progressives, mais avec un couvert résiduel un peu plus élevé et des tiges d’avenir mieux espacées.

Un suivi de la régénération réalisé 5 ans après la coupe (2014) permet de tirer certaines conclusions. L’éclaircie commerciale feuillue modifiée (ECFm), qui est en réalité devenue une variante des coupes progressives, est ressortie comme le traitement le plus performant parmi les trois comparés, contrairement aux hypothèses qui favorisaient initialement la CPU. Il faut se rappeler qu’il n’a pas été possible pour le MRNF de scarifier le sol dans le chantier, à cause de contraintes logistiques et financières, et ce malgré les nombreuses recommandations à cet égard dans la littérature: ceci expliquerait en partie les faibles distributions et densités de régénération tout de même obtenues dans la CPU.

En se rappelant qu’il s’agit d’un seul dispositif, on en retire les enseignements suivants ; la coupe doit être assez forte pour favoriser la lumière au sol (en n’oubliant pas l’obstruction des perches et du petit bois); des modalités d’espacement en mètre entre les tiges du peuplement résiduel permettent un meilleur contrôle de la distribution du couvert semencier protecteur; le scarifiage fait partie des conditions de réussites, lorsqu’il est synchronisé avec une bonne année semencières. Il est important également de faire un suivi phytosanitaire. Le projet démontre également la possibilité, moyennant les modifications proposées, d’établir une futaie biétagée dont la maturité technique (pour l’étage supérieur) est prévue à 150 ans. Un cas d’éclaircie commerciale a également été installé et les suivis de croissance par arbre et à l’hectare permettront de documenter ce scénario équienne à structure régulière comparativement aux autres.

Des recommandations ont été proposées pour augmenter la performance du scénario actuel et la poursuite des recherches : elles concernent un dégagement à l’européenne à réaliser le plus tôt possible. Il y aurait aussi des interactions entre la présence de scarifiage, la densité des semenciers de pin blanc, la densité de couvert et le milieu (combinaison texture/épaisseur/drainage), mais elles demeurent à valider, puisque le dispositif n’a pas permis de les documenter avec précision à ce stade-ci. Finalement, l’axe d’aménagement de succession assistée pour le pin blanc doit maintenant être déployé.

Régime de la futaie irrégulière et suivi de la biodiversité faunique dans le sous-domaine de l’érablière à bouleau jaune de l’ouest, version 2. CERFO. Rapport 2013-18. 151 pages + 4 annexes.

Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les forêts en avril 2013, l’importance grandissante des coupes progressives irrégulières (CPI) soulève plusieurs inquiétudes chez les biologistes responsables de la faune quant à leurs impacts éventuels sur les habitats fauniques.

Un projet a donc été mis sur pied afin de se pencher sur l’effet des CPI sur les caractéristiques d’habitat. Pour ce faire, les exigences des trois espèces sensibles à l’aménagement identifiées par le MRN pour l’Outaouais ont été examinées. Ces espèces sont : le pékan, le grand pic et la paruline couronnée. Un catalogue des différents patrons et variantes de CPI a été réalisé, comptant : coupe progressive irrégulière par micro-peuplements, avec couvert permanent, par trouées agrandies, à régénération lente en plein, par lisières, avec approche multitraitement, éclaircie commerciale irrégulière et traitement hybride (jardinage extensif). Pour chacun de ces cas, une fiche analytique décrit le procédé de régénération, les objectifs, les peuplements potentiellement adéquats, les aspects cruciaux associés à leur réalisation, les effets potentiels sur les enjeux écologiques et les espèces sensibles, et présente certaines considérations économiques.

Un chantier de coupe a été retenu comme exemple pour l’analyse des exigences des espèces sensibles. Différents traitements ont été simulés et l’évolution des conditions après coupe a également été évaluée par rapport à ces exigences. Des indications sont fournies quant au temps de restauration nécessaire pour certaines conditions propices aux espèces sensibles, à la suite des interventions. Des hypothèses ont aussi été posées quant à l’évolution des conditions d’habitat associées à l’application des différents scénarios sylvicoles du régime de la futaie irrégulière. Les résultats obtenus ont également été analysés à l’échelle de l’UTR et à une nouvelle échelle de référence, soit le groupe de parcelles du parcellaire, dont la dimension s’approche de la superficie du domaine vital du pékan. Des mesures d’atténuation ont été déterminées afin de réduire, dans la mesure du possible, les effets négatifs des CPI sur l’habitat des trois espèces considérées.

À partir des connaissances préliminaires tirées de la littérature, il semble qu’aucun type de CPI ne conviendrait à la paruline couronnée en raison de l’ouverture du couvert favorable à l’établissement de la régénération, qui se traduit par un développement du sous-bois ne convenant pas à cette espèce. De plus, la préparation de terrain n’est pas compatible avec sa nidification au sol utilisant la litière feuillue. Il faut, par conséquent, prévoir le maintien en rétention de noyaux durs d’habitat d’une superficie supérieure à 90 ha constitués de vieux peuplements feuillus fermés, et situés à l’intérieur de blocs forestiers non fragmentés mesurant au moins 500 ha, afin d’assurer la viabilité d’une population locale.

D’après les informations disponibles, le pékan pourrait s’accommoder des habitats créés par les coupes partielles, si le couvert résiduel est suffisant et que la complexité structurale n’est pas trop affectée négativement par l’intervention. Cependant, le modèle de qualité d’habitat (MQH) du pékan est à revoir. Actuellement, cette espèce apparaît comme opportuniste puisqu’elle suit ses proies; en effet, la présence de résineux ainsi que l’ouverture du couvert ne semblent pas représenter des facteurs significatifs pour qualifier son habitat, contrairement à la présence d’arbres à cavités et de gros débris ligneux au sol (refuge et aire de repos), qui constituent des composantes essentielles de son habitat.

Le grand pic pourrait aussi fréquenter les habitats générés par les coupes partielles, à condition de prévoir la rétention de gros chicots et arbres moribonds. Il semble s’accommoder des coupes actuelles.

Cependant, pour toutes ces espèces, la coupe finale prévue dans plusieurs des scénarios de coupes progressives entraîne la perte des attributs essentiels pour quelques décennies, notamment ceux qui confèrent au peuplement le statut de vieille forêt, soit la présence importante de gros arbres et une couverture arborescente supérieure à 40 %. Des modalités de rétention peuvent alors être considérées pour limiter les effets négatifs.

Ceci est la version 2 du rapport. Elle remplace la première version du rapport, sortie en septembre 2013.

Effets des coupes progressives irrégulières sur la régénération du bouleau jaune et l’utilisation par le lièvre d’Amérique

Dans la région du Témiscamingue, comme dans d’autres régions feuillues du Québec, on assiste à des déficiences de la régénération pour plusieurs espèces semi-tolérantes comme le bouleau jaune (Betula alleghaniensis). Dans un contexte d’aménagement forestier durable, la coupe progressive irrégulière (CPI) est proposée pour contribuer à incorporer davantage toute la complexité et l’irrégularité des forêts naturelles. L’objectif principal du projet est de documenter l’effet de trois types de CPI (par trouées, par lisières et en plein) sur l’installation et la survie de la régénération ainsi que leurs impacts sur l’utilisation de l’habitat par le lièvre d’Amérique (Lepus americanus). Cette étude permettra aux aménagistes des ressources naturelles ainsi qu’aux participants des Tables de Gestion Intégrée des Ressources et du Territoire TGIRT, de mieux évaluer l’effet à court terme des coupes progressives irrégulières sur ces espèces dans les forêts mixtes et feuillues. Elle vise ainsi à contribuer à l’évaluation des impacts des Plans d’aménagement forestier intégrés (PAFI) sur les habitats fauniques.

Pauline Suffice, étudiante à la maîtrise en Biologie à l’UQAT sous la direction de Louis Imbeau, professeur à l’UQAT et de Gilles Joanisse, chargé de projet au CERFO, a présenté une affiche au 7e colloque annuel du centre d’étude de la forêt (CEF) à Montebello

Déploiement de pratiques sylvicoles adaptées dans les UAF 42-51 et 43-52. CERFO. Rapport 2012-17. 114 pages + 9 annexes et un CD.

Dans la région de la Mauricie, la régénération des espèces semi-tolérantes (BOJ, PIB, etc.) ainsi que de l’épinette rouge s’avère difficile et la possibilité en bois d’oeuvre de ces espèces ainsi que la biodiversité deviennent compromises. L’une des causes possibles serait les procédés de régénération utilisés. Traditionnellement, les options étaient dichotomiques: d’une part, le régime de la futaie régulière qui demeure risqué pour favoriser la régénération désirée et contrôler la régénération, d’autre part le régime de la futaie jardinée, qui est peu approprié pour régénérer abondamment les espèces semi-tolérantes. Or, dans la continuité de la Commission Coulombe, Forêt Québec et le Bureau du forestier en chef proposent maintenant un virage important en ajoutant l’option de la futaie irrégulière. En Mauricie, plusieurs dispositifs expérimentaux et essais sylvicoles ont été réalisés afin d’explorer différentes traitements et patrons dans ce régime. Parmi ces solutions, l’ESIP est apparue avec des objectifs de récolte clairs, mais des objectifs sylvicoles particulièrement confus. Les modalités sont simplistes, incomplètes pour la régénération et l’éducation du peuplement et les critères de performance complètement inadaptés par rapport aux objectifs de biodiversité retenus par la région. Les objectifs sylvicoles de l’ESIP ne permettent pas d’atteindre les objectifs du développement durable puisque ce traitement est principalement axé sur la récolte.

L’une des avenues les plus prometteuses, sans être la panacée est la coupe progressive irrégulière. Instaurée en Mauricie, dans la forêt mixte à bouleau jaune et dans les érablières, par CCPL en collaboration avec le MRNF et le CERFO, elle présente une souplesse d’exécution permettant de mieux répondre aux divers enjeux régionaux tels la régénération des espèces désirées, la limitation de la colonisation des espèces non désirées et l’optimisation de la croissance des tiges d’avenir. L’équilibre entre la récolte actuelle en bois d’œuvre et la production de bois d’œuvre futur devient possible. Convaincue par les succès obtenus, notamment au Lac Turcotte, la compagnie CCPL a exprimé le besoin d’explorer à grande échelle l’application de ce régime sylvicole dans une grande variété de situations. Les défis étaient de taille, tant conceptuels, opérationnels qu’humains.

Ce projet vise à permettre aux intervenants forestiers de la Mauricie de développer leur capacité à déployer une sylviculture qui soit davantage diversifiée, structurée et plus performante face aux engagements de développement durable du gouvernement du Québec (enjeux de biodiversité et de production). Plus spécifiquement, le projet explore différentes options sylvicoles non traditionnelles, inspirées des récents résultats de recherche, permettant de traiter plusieurs hectares qui seraient difficilement traitable actuellement. De plus, il expérimente en profondeur de nouveaux outils disponibles d’aide à la décision à l’étape du diagnostic sylvicole, tels la photo-interprétation fine et l’évaluation économique. La méthode de résolution de problèmes sert de démarche scientifique et l’approche d’ingénierie de processus est utilisée pour la conduite des peuplements.

Dans les UAFs 42-51 et 43-52, les prescriptions sylvicoles ont été préparées sur une superficie de 3 736 ha. Afin de faciliter la démarche de diagnostic sylvicole, des logigrammes ont été conçus et appliqués aux secteurs retenus. Ces outils d’aide à la décision décrits dans le présent rapport et élaborés à l’aide des données cartographiques bonifiées sont des clés décisionnelles qui permettent de dégrossir rapidement les familles de traitements (famille de la futaie régulière, ou de la futaie irrégulière ou jardinée) et de prioriser en premier lieu le choix de régime. Dans un deuxième temps, une démarche par résolution de problème en 6 étapes est appliquée: les données d’inventaire permettent alors de compléter et préciser le diagnostic et la prescription alors que les visites sur le terrain permettent de confirmer les modalités d’intervention et les agglomérations opérationnelles des traitements par chantier. Dans le cadre de ce projet, les marteleurs et les travailleurs forestiers ont été encadrés sur le terrain afin de s’assurer de leur compréhension et de la bonne mise en application des modalités lors du martelage et de la récolte. Cet encadrement est également obligatoire en vue de maintenir les standards de qualité élevés et d’atteindre les objectifs de conformité et de rentabilité. Enfin, dans un contexte économique difficile, cette nouvelle démarche permet d’atteindre les objectifs sylvicoles visant à installer une régénération en essences désirées, optimiser la croissance des tiges résiduelles et permettre un approvisionnement rentable.

Quelques secteurs ont présenté de grands succès : on pensera au secteur Bergeron qui a permis une récolte de 85 m3 /ha et près de 40% en bois d’œuvre, même avec les difficultés de marché pour l’érable. Mais le succès réside également dans l’établissement d’une conduite de peuplement pour optimiser la croissance, grâce à l’espacement optimal des tiges et le maintien d’un couvert protecteur pour contrôler l’envahissement de la compétition. Suite au scarifiage prévu cet année, ce secteur constituera un excellent exemple pour démontrer qu’il est possible d’intensifier la pratique sylvicole en utilisant la régénération naturelle et en maintenant, lorsque possible, l’esthétisme du paysage.

D’autres secteurs se sont avérés problématiques, particulièrement lorsqu’on retrouvait des peuplements JIN. Prévu dans les logigrammes comme pouvant ne pas être traités, les bénéficiaires avaient convenus de les inclure dans la récolte pour augmenter le nombre de m3/km de chemin. Malheureusement, l’abondance des petites tiges présentes a engendré plusieurs difficultés : coûts d’opération élevés, difficulté de mise en marché, martelage fastidieux et irréaliste et même un certain découragement des exploitants. Sans marché, l’intégration de ce type de peuplement est difficile. S’il est tout de même décidé de l’exploiter, l’option sans marteleur devrait être explorée.

Outre les différents résultats, le rapport présente des discussions et des recommandations validées collégialement lors de journées de travail. Y sont abordés les thèmes suivants: filtres, démarche diagnostique, modalités par patron de CPI, impacts du traitement, processus d’agglomération et chantier, traitements des jeunes peuplements (JIN, JIR), visite terrain pour validation, formation et suivis ainsi que le processus de déploiement en lui-même.

Quelques obstacles importants demeurent pour finaliser le transfert technologique des innovations et les actions suivantes sont proposées:

  • De poursuivre le travail de sensibilisation face aux exigences de l’OIFQ et de l’AFD pour construire des prescriptions par options et argumentation.
  • D’adopter les approches par chantier en planification et en sylviculture.
  • De poursuivre le développement des habiletés des officiers du MRNF à prescrire dans le nouveau contexte de l’AFD par un atelier en situation réelle de travail.
  • De favoriser le travail en collégialité entre professionnels, lors des exercices de planification
  • D’établir des cibles précises de production par UAF.
  • De poursuivre les recherches sur la régénération dans la Haute-Mauricie pour préciser les superficies où les risques d’envahissement sont majeurs et les superficies où ils sont mineurs.

Actuellement, la sensibilisation aux enjeux de biodiversité et de production, à la gestion du risque, à la démarche de résolution de problème et à une approche moins subjective et plus scientifique de la sylviculture doit être maintenue. Les difficultés économiques et de mise en marché actuel ainsi que le changement de régime demanderont plus d’imagination, de souplesse et de créativité. Le travail en collégialité et l’adoption de méthodes structurées mais souple sont certainement des pistes de solutions.

Réalisation d’un dispositif de comparaison de modalités de coupes progressives irrégulières visant à favoriser la régénération et la croissance du chêne rouge. CERFO. Rapport 2011-11. 80 p.

Dans les peuplements sous aménagement, la régénération en chêne rouge (CHR) sur plusieurs stations forestières est souvent absente ou déficiente. Dans son document sur « Les enjeux de biodiversité relatifs à la composition forestière » (Grondin et Cimon, 2003), le Ministère reconnaît effectivement la raréfaction du chêne, espèce compagne de l’érablière, comme un enjeu de biodiversité pour la composition forestière. Dans la région de l’Outaouais, le Plan régional de développement intégré des ressources et du territoire (PRDIRT) mentionne d’ailleurs la raréfaction des chênaies rouges comme un enjeu écologique prioritaire. Tel que mentionné par le comité du Manuel d’aménagement forestier (MRNF, 2004), le défi de la biodiversité repose sur la nécessité de développer et de mettre en œuvre une sylviculture proche de la nature afin de maintenir à long terme la biodiversité des peuplements naturels.

Le présent projet cherche donc à définir des modalités efficaces pour restaurer la présence de CHR dans un procédé de régénération par CPI. Dans cette optique, il a pour objectif de réaliser une coupe progressive irrégulière dans des peuplements avec CHR pour favoriser sa régénération et suivre les effets réels (régénération et bois sur pied) de différentes modalités de remise en production. Enfin, il vise à fournir un exemple local pour la justification de l’adoption d’une telle stratégie dans la planification de l’aménagement. Les objectifs spécifiques du projet sont : (1) la formation des marteleurs, des contremaîtres, des agents du MRNF; (2) la réalisation d’une CPI dans des peuplements jeunes et dans des peuplements vieux pour fins de comparaisons; (3) la détermination du type de placettes échantillon (à rayon fixe ou à rayon variable) à privilégier pour évaluer la CPI; (4) la comparaison des volumes récoltés et la quantité de bois d’œuvre pour le jardinage et pour la CPI; (5) l’évaluation de la pertinence de l’utilisation de la photo-interprétation fine pour préciser les contours; (6) l’évaluation de la rentabilité des travaux effectués dans le secteur Cloak; (7) la vérification de la capacité de la CPI à rencontrer les objectifs de fonction sylvicole.

Le secteur de CPI ayant une superficie de 88 ha a été installé dans le secteur Cloak dans l’UAF 071-51 localisé dans le sous-domaine de l’érablière à tilleul de l’ouest. La méthode de démarche de diagnostic sylvicole a été appliquée et le choix de la prescription découle d’une analyse argumentée et documentée. Des formations ont été données aux marteleurs, contremaîtres et bûcherons. Tout au long de l’encadrement des travailleurs, une rétroaction constante a été effectuée, ce qui a permis le transfert des connaissances et l’intégration opérationnelle des nouvelles modalités. Selon l’évaluation qui a été faite, la formation a permis de réaliser un martelage qui respecte la prescription de CPI. Ainsi, le martelage a permis de diminuer la proportion de surface terrière ayant une faible vigueur (M et S) et augmenter celle qui est vigoureuse (C et R). Le martelage réalisé a également permis d’augmenter la proportion de surface terrière en essences désirées bien réparties sur le territoire. Une évaluation plus précise de la conformité pourrait être réalisée directement sur le terrain en effectuant les calculs en temps réel. Les opérations réalisées ont permis de laisser un peuplement résiduel qui atteint les objectifs prévus dans les modalités de martelage et de récolte.

Les suivis en temps réel ont été effectués en utilisant des placettes à rayon fixe afin de mieux estimer l’espacement entre les tiges tel que décrit dans les consignes de martelage. Considérant une équivalence dans les méthodes d’inventaire au prisme et à rayon fixe lors des compilations (volumes, surface terrière, tiges à l’hectare), l’utilisation de placettes au prisme pour faire le suivi du martelage et des opérations en temps réel sur le terrain est à explorer.

La photo-interprétation fine du secteur a permis de préciser les contours des peuplements, et de mieux séparer les peuplements JIN et VIN que la cartographie du 4e décennal. De plus, la prescription réalisée sur le secteur correspond à la stratégie du CHR proposée dans Grenon et al. (2011). Ainsi, l’application de la stratégie pour prévoir les types de traitements pour régénérer le CHR est recommandée.

Des comparaisons du prélèvement de jardinage versus la coupe progressive irrégulière ont été faites. La récolte d’un nombre de tiges plus élevée mais de plus faible volume a été notée dans la CPI comparativement au jardinage, quoique les peuplements initiaux dans les deux types de coupes n’étaient pas identiques. Ceci a résulté en un volume par tige récoltée moyen plus faible pour la CPI que pour le jardinage. Ceci s’explique par les modalités de traitements et les objectifs, ainsi que les DHP plus faibles initialement pour la CPI. Dans le cas où les opérations sont réalisées dans un jeune peuplement, tel qu’un JIN, cette intervention correspond davantage à une éclaircie commerciale plutôt qu’une étape de coupe d’ensemencement, et c’est au moyen d’une évaluation de la rentabilité de la récolte que la décision d’intervenir ou non peut être prise.

Suivant les interventions et l’obtention de la photo-interprétation fine, un dispositif comportant 5 blocs expérimentaux par traitement (CJ et CPI) est planifié. Chacun des blocs proposés dans la coupe progressive irrégulière est scindé en 6 unités de traitement : (1) sans préparation et régénéré naturellement, (2) avec préparation de terrain régénéré naturellement, (3) sans préparation de terrain avec reboisement hâtif, (4) sans préparation de terrain avec reboisement tardif, (5) avec préparation de terrain avec reboisement hâtif, (6) avec préparation de terrain avec reboisement tardif. Trente unités de traitement ont été créées, soit 5 répétitions de 6 traitements. Pour les blocs expérimentaux proposés dans la coupe de jardinage, ceux-ci sont scindés en deux unités de traitement où sont appliquées les modalités suivantes : unité témoin (sans préparation de terrain régénéré naturellement) ; unité avec préparation de terrain régénérée naturellement. Dans la coupe de jardinage, il y a 10 unités de traitement créées, soit 5 répétitions de 2 traitements.

L’implantation du dispositif et de son suivi permettra de vérifier la capacité de la CPI à rencontrer les objectifs de fonction sylvicole.

Les coupes progressives irrégulières

Comme la coupe progressive d’ensemencement, la coupe progressive irrégulière est constituée de coupes partielles visant à installer la régénération, tout en maintenant un couvert protecteur. La période de régénération s’étend cependant sur une plus longue durée. De plus, ce procédé constitue un moyen d’étirer la récolte d’essences à longévité élevée, assurant la production de tiges à plus fort diamètre et un revenu réparti sur une plus longue période. Il permet aussi de répondre à des considérations écologiques ou sociales (esthétisme, production faunique…). Tous ces avantages rendent ce procédé très intéressant pour les propriétaires de lots privés. Les peuplements ciblés par la CPI ont les caractéristiques suivantes :

* Production d’essences tolérantes ou semi-tolérantes à l’ombre, exigeant la présence d’un couvert protecteur pour l’établissement et la survie des semis (bouleau jaune, chêne rouge, pin blanc, épinettes blanche et rouge, thuya occidental…).

* Régénération préétablie en essences désirées insuffisante ou présence d’une régénération suffisante mais risque élevé d’envahissement par la compétition après l’ouverture du couvert;

* Structure irrégulière du peuplement, souvent bi-étagée ou par groupes de différents âges (sociabilité en îlots);

* Peuplements composés d’essences à longévité variable, dont on veut maintenir certaines sur pied durant une bonne période.

Article paru dans le Monde forestier du mois de septembre 2007

Sylviculture adaptée aux peuplements mixtes : les coupes progressives irrégulières. CERFO. Technote 2007-05.

Le domaine de la sapinière à bouleau jaune présente de nombreux peuplements mixtes dont la variation de composition et d’autécologie des espèces en présence pose un défi au sylviculteur quant à la manière de les traiter. On y retrouve souvent d’importantes déficiences en ce qui a trait à la régénération en essences désirées, tels le bouleau jaune, une essence de grande valeur peu favorisée par les traitements de jardinage par pied d’arbre actuels, les épinettes dont l’épinette rouge et le pin blanc. Par ailleurs, une régression progressive en volumes de qualité sciage ou déroulage en essence désirée est observée.

Le CERFO a entrepris des études afin d’explorer une certaine diversification des interventions sylvicoles (telles que préconisées dans le Manuel d’aménagement) dans trois régions : Lanaudière, la Baie-des-Chaleurs et la Mauricie. Les trois dispositifs sont localisés dans le domaine bioclimatique de la sapinière à bouleau jaune et de l’érablière à bouleau jaune et visent plus précisément à expérimenter les types de coupe progressive irrégulière qui pourraient permettre la réintroduction du bouleau jaune de qualité sciage et de l’épinette dans ces forêts.

Entre les coupes progressives et le jardinage par trouées : le cas des coupes progressives irrégulières

Le grand tournant dans l’histoire de la sylviculture se situe vers 1880, à l’époque où se développe l’idée d’une sylviculture proche de la nature. Elle se fonde principalement sur la régénération naturelle des forêts, et la création de peuplements mélangés. Dès les premières décennies du siècle dernier, l’idée va conduire, dans les pays alpins germanophones, à l’essor de méthodes de régénération en coupes progressives (« Schirmhieb ») de différentes factures (Schütz 1997).

Quasiment à la même époque, s’amplifie le concept du jardinage2 se situant dans le même esprit. Même si actuellement, certains tentent de l’opposer au régime de la coupe progressive; ils ont tort! L’un et l’autre régime poursuivt le même but : générer des peuplements mélangés et différenciés (Schütz 1997). Lorsque l’on entrevoit de recommander le mélange des essences en tant que principe de sylviculture, seule l’approche synécologique est concevable. La seule transposition des connaissances dérivées de l’observation de collectifs purs est boiteuse (Schütz 1997). Le fondement du mélange des essences le plus fin envisageable a été distinctement postulé depuis Gayer (1886) et réalisé dès lors avec plus ou moins de conviction, de persévérance et de résultat positif, dans les régions périalpines de la Bavière, du Bade-Wurtemberg et de la Suisse (Schütz 1997). Kramer et al. (1988) ont proposé un excellent résumé des recherches à propos des peuplements mélangés. Suivant Schütz (1997), il n’est pas aisé de tirer des conclusions qui soient généralisables à propos de la gestion des forêts mélangées. Ce qui est identique d’une région à l’autre est que, plus que la gestion des futaies régulières ou monospécifiques, les mélanges demandent une attention et un suivi cultural plus élevé et en conséquence plus onéreux.

La sylviculture régulière classique, développée en Europe depuis plus de deux siècles et fondée sur la sélection constante des peuplements, pendant toute la durée de leur révolution, a conduit notamment aux chênaies régulières remarquables (Réno-Valdieu, Tronçais, Bellême, etc.) dont les forestiers français extraient encore actuellement des bois de choix : tranchages, merrains (bois de futailles) et sciages. Ainsi, les techniques d’éclaircie s’appliquent à réaliser graduellement, au sein des peuplements issus de régénération naturelle : un dosage d’essences en faveur des espèces principales objectif, une sélection massale au sein de ces espèces et un espacement progressif des tiges organisant la croissance en diamètre. Elles ont fait leurs preuves et ne sont nullement remises en cause.