Avec l’avènement du nouveau régime forestier, les Commissions des ressources naturelles et du territoire (CRRNT) ont la responsabilité de mettre sur pied et d’animer des tables locales de concertation multi-ressources nommées Tables de gestion intégrée des ressources et du territoire (TGIRT). Parmi les rôles qui sont confiés aux membres des TGIRT, on retrouve l’évaluation des impacts des Plans d’aménagement forestier intégré (PAFI) soumis par le MRN. Cependant, les outils d’aide à la décision disponibles pour les TGIRT sont peu nombreux et souvent mal adaptés au contexte régional, particulièrement pour la faune du domaine de l’érablière à bouleau jaune de l’ouest. Tel est le cas pour le modèle d’IQH de l’orignal. En effet, le modèle d’IQH pour l’orignal (Alces alces) actuellement utilisé a été bâti à partir de données provenant de la sapinière à bouleau blanc, possiblement mal adaptées à l’érablière à bouleau jaune de l’ouest de l’Outaouais. Le modèle actuel comprend des indices de qualité de nourriture (IQnourriture) et d’entremêlement de nourriture et d’abri (IQentremêlement), indices dont l’importance est non connue pour l’érablière à bouleau jaune de l’ouest. Les aménagistes de la forêt et de la faune ainsi que les tables GIRT ont besoin d’un outil valide et adapté au principal domaine bioclimatique de la région, soit l’érablière à bouleau jaune. Ainsi, le présent projet vise l’adaptation et la validation de l’indice de qualité d’habitat de l’orignal pour le domaine de l’érablière à bouleau jaune en Outaouais et l’établissement d’un outil efficace et adapté au contexte régional pour permettre l’évaluation des pratiques d’aménagement forestier sur une espèce à l’origine d’enjeux prioritaires sur les plans environnemental, économique et social en Outaouais.
Pour réaliser le projet, une caractérisation des peuplements retrouvés dans l’érablière à bouleau jaune de l’ouest est primordiale. Ainsi, une stratification de l’érablière à bouleau jaune de l’ouest a été réalisée en fonction des appellations cartographiques du 4e décennal. Un inventaire de bois sur pied et de brout comprenant 1 798 points d’observation a été réalisé à l’été 2012 et des compilations pour les différentes strates ont été réalisées. Les analyses ont révélé que la stratification produite était appropriée et il y avait une forte correspondance avec les données d’inventaire. Ensuite, les strates ont été cotées en fonction de leur potentiel d’abri et de nourriture pour calculer différents indices de qualité d’habitat, soit IQnourriture, IQentremêlement et des indices de qualité d’abri (IQabri). Ces indices ont été comptabilisés pour des parcelles de 100 ha et de 500 ha et mis en relation avec les données d’inventaires de pistes d’orignaux de l’hiver 2012 pour déterminer les indices significativement reliés aux quantités de pistes d’orignaux, calculées en terme de proportion de superficie. Il s’est avéré que l’IQnourriture était l’indice expliquant le mieux la proportion de pistes observée pour les deux échelles de parcelles, suivi de l’IQabri, ce dernier étant calculé à partir de la surface terrière résineuse relative, c’est-à-dire qui tient compte de la capacité d’interception de la neige des différentes espèces résineuses. Pour ces deux indices, les relations étaient significativement meilleures lorsque la densité d’orignaux connue était plus élevée, donc où les orignaux peuvent être en compétition pour la sélection d’habitat. Néanmoins, les relations étaient quand même très faibles avec des R2 inférieurs à 0,12. Comme les mêmes indices de qualité, soit l’IQnourriture et l’IQabri, étaient significatifs pour les deux échelles un modèle d’IQH global est proposé (IQH= 0.70 * IQnourriture + 0.30 *IQabri) pour lequel la proportion de pistes augmente significativement avec l’augmentation de l’IQH pour les deux échelles. Le modèle proposé pour l’érablière à bouleau jaune de l’ouest améliore celui de Dussault et al. (2006) développé pour la sapinière à bouleau blanc. Les limites de prédiction du modèle sont discutées dans le rapport. Ce modèle, quoique significatif, pourra être amélioré par de futures études qui pourront intégrer d’autres variables biotiques et abiotiques ainsi que par la réalisation des suivis de pistes à plus long terme et de télémétrie d’orignaux.