Séquestration du carbone en milieu routier. Le progrès forestier. Printemps 2022. 28-30.

En 2017, le ministère des Transports du Québec s’est engagé dans son Plan d’action de développement durable, à réduire et à compenser les émissions de gaz à effet de serre liées à ses activités, dans une optique de carboneutralité. Ainsi, en plus de mettre en place des actions d’évitement et de réduction à la source des émissions de GES générées par ses activités, le ministère a décidé de compenser les émissions de GES qui n’ont pu être évitées ou réduites. Une Stratégie de séquestration du carbone dans un contexte routier a donc vu le jour. Elle vise à créer de nouveaux boisés par des plantations dans des friches et à proposer l’aménagement de boisés existants tout en les protégeant d’une conversion. Ce projet s’insère dans cette Stratégie et poursuit alors l’objectif général d’augmenter la quantité de carbone séquestrée dans les différents réservoirs de carbone, et ce, dans un contexte routier, sur des terres appartenant au ministère des Transports.

Dans un premier temps est présentée une revue des techniques de végétalisation, de boisement et d’aménagement applicables au contexte routier du Québec, permettant la séquestration du carbone, avec des objectifs de maximisation et de pérennité des stocks de carbone, de bénéfices climatiques qui y sont associés et de la fonctionnalité des écosystèmes.

Des sites couvrant environ 416 ha répartis en Mauricie, dans le Centre-du-Québec, en Montérégie et dans la région de Montréal ont été caractérisés sur la base d’une méthode reproductible, en utilisant les données cartographiques disponibles (cartes écoforestières, dérivées du lidar, pédologiques) et des données recueillies sur le terrain. Huit principaux cas-types sont issus de cette caractérisation : les milieux riches de loams ou d’argiles bien drainés dans l’érablière à caryer (cas-type 1), ceux plus sablonneux bien drainés (cas-type 2), les milieux riches de loams ou d’argiles de drainage imparfait dans l’érablière à caryer (cas-type 3), les milieux constitués d’argiles ou d’argiles lourdes de drainage modéré ou imparfait dans l’érablière à caryer (cas-type nouveau 3) les milieux de loams ou d’argiles bien drainés dans l’érablière à tilleul (cas-type 4), les milieux de loams ou d’argiles de drainage imparfait dans l’érablière à tilleul (cas-type 5), ceux mal drainés (cas-type 6) et les sites avec une présence importante de phragmite (cas-type 7). Pour les cas-types 6 et 7, il est décidé que la non-intervention (aucun aménagement des boisés et aucune plantation dans les friches) est la meilleure option.

Dans les sites en friche, quatre patrons de plantations complexes sont proposés (variations dans le choix des essences plantées, des espacements entre les plants et des interventions planifiées en entretien et en récolte). Le choix des essences repose avant tout sur la recherche d’une diversité structurelle et fonctionnelle et sur la production à maturité d’un peuplement constitué majoritairement d’espèces longévives, permettant de produire du bois de sciage et qui offrent la possibilité de jouer un rôle de substitution. Le choix et la séquence des essences ont aussi été guidés par les objectifs d’un des projets de recherche concernant la réponse des variétés au processus de mycorhization, lorsque ces dernières sont, soit à proximité d’essences ayant le même type de mycorhization, soit d’un type différent.

Lorsque les superficies disponibles le permettent, ces patrons ont ensuite été intégrés dans un dispositif expérimental dont l’objectif général est de suivre, à long terme, le bilan de carbone à l’échelle du milieu. Actuellement, les cas-types Nouveau 3 et 5 disposent de 3 ou 4 blocs expérimentaux, permettant d’avoir un dispositif statistiquement rigoureux. Il n’a par contre été possible de trouver sur le terrain qu’un seul bloc pour le cas-type 2. Dans les friches de superficie trop restreinte pour accueillir le dispositif, le patron Entretien limité est favorisé. Au total, dans et hors dispositif expérimental, ce sont 27,5 ha qui sont actuellement planifiés en plantation en Mauricie et dans le Centre-du-Québec (la préparation du sol a été réalisée à l’automne 2021 et la plantation le sera en 2022) et 31 ha dans la région de Montréal. La plantation de 22,6 ha en Montérégie a été réalisée en 2021.

L’analyse diagnostique des boisés a mis en évidence qu’une partie des sites couvrant près de 18 ha n’offre pas le potentiel d’optimisation de la séquestration du carbone par des actions sylvicoles (milieux où la croissance des arbres serait restreinte de par la présence de contraintes telles l’humidité excessive ou une forte compétition) ou ne nécessite pas d’intervention à court terme pour remplir ce rôle. Certains peuplements, par contre, offrent un potentiel d’optimisation de la séquestration du carbone par la sylviculture. L’objectif général est alors de favoriser la croissance d’essences longévives (au moins 100 ans) permettant de stocker le carbone sur une longue période de temps et de diversifier les structures verticales des boisés. Éventuellement, la production de bois de sciage ou autres produits de longue durée sera possible sur ces sites. Ces peuplements ont fait l’objet d’un diagnostic sylvicole plus précis et d’une prescription sylvicole à court terme. Ils couvrent 10 ha en Mauricie-Centre-du-Québec, 25,6 ha en Montérégie et 66,7 ha dans la région de Montréal.

Plusieurs scénarios sylvicoles types ont également été décrits pour guider les interventions à réaliser dans le futur, qu’il s’agisse de plantations en friche ou de boisés. 

Concernant les analyses financières, on note des différences importantes entre les scénarios de plantations et d’aménagement des boisés pour les coûts, les revenus et les VAN, les plantations ayant souvent des valeurs négatives. Ceci est surtout attribué aux coûts importants d’implantation et d’entretien des plantations, qui sont à investir au début de la vie du peuplement.

Le succès d’un tel projet est dans le long terme, car, comme tout projet qui repose sur la croissance des arbres, les effets des plantations et des interventions sylvicoles sur le bilan carbone et sur le système climatique prendront du temps à se matérialiser et seront progressifs. Il est donc essentiel de s’assurer que les nombreuses organisations impliquées dans le projet collaborent adéquatement sur le long terme. La survie des plantations et une séquestration optimale du carbone dépendent de la mise en œuvre des scénarios sylvicoles et de la réalisation dans le futur, de certaines interventions stratégiques sur le terrain. Il est alors primordial que le financement nécessaire à la réalisation de ces interventions soit immédiatement introduit dans la planification financière à moyen et long terme du MTQ pour assurer leur réalisation selon le calendrier proposé et avec l’expertise appropriée. Des suivis dans le temps sont également requis pour identifier les réussites et les échecs, dans le but de faire des recommandations axées sur la performance et l’expérience. Les bénéfices qui seront quantifiés et utilisés pour compenser les émissions de GES fossiles seront dépendants du respect de la stratégie développée.  

Une subvention du FRQNT pour aider à inventorier le carbone forestier dans nos dispositifs expérimentaux

Le FRQNT vient d’annoncer les récipiendaires des subventions dans le cadre du Programme de recherche en partenariat sur la contribution du secteur forestier à l’atténuation des effets des changements climatiques. L’un des trois projets financés est celui dirigé par Evelyne Thiffault, professeure à l’Université Laval, auquel l’équipe du CERFO participera. Les fonds octroyés permettront entre autres de mesurer le niveau de séquestration du carbone dans certains des dispositifs expérimentaux du CERFO et de comparer l’effet de plusieurs traitements sylvicoles sur le bilan carbone.

Pour en apprendre davantage, cliquez ici.

Développement de stratégies sylvicoles pour la production de peuplements résilients et tolérants constitués de chêne rouge et de pin blanc. Rapport 2018-06. 97 p.

La capacité d’adaptation du pin blanc et du chêne rouge face aux nouvelles conditions climatiques ainsi que leur valeur importante sur les marchés de la transformation, en font deux essences à fort potentiel pour les forêts feuillues et mixtes de l’Outaouais. Au cours des dernières décennies, le contrôle des feux de forêt et l’application de coupes partielles à grande échelle ont entraîné leur régression marquée, justifiant de réfléchir sur les approches sylvicoles nécessaires à intégrer dans les scénarios sylvicoles, afin de renverser cette tendance.

C’est dans ce contexte que ce projet vise à élaborer, en étroite collaboration avec des industriels preneurs de pin blanc et/ou de chêne rouge et la direction régionale du MFFP, une stratégie de production de peuplements constitués de chêne rouge ou de pin blanc, conçus pour être tolérants et résistants aux changements climatiques, et permettant à la fois : d’augmenter la productivité du territoire, de créer des puits de carbone et de favoriser la biodiversité.

Dans un premier temps le portrait de l’évolution du climat et son impact sur la migration d’espèces, en particulier le chêne rouge et le pin blanc, ont été dressés. Il a permis de confirmer que les nouvelles conditions climatiques prédites dans des horizons 30 et 60 ans devraient créer des habitats plus favorables ou nouveaux pour ces deux espèces.

Ensuite, les propositions de stratégies sylvicoles et d’aménagement pour la production de ces deux essences ont été formulées. Elles reposent sur plusieurs informations : (1) la stratégie en cours d’élaboration par le MFFP, afin de rendre les livrables de ce projet compatibles avec l’approche et les outils décisionnels du MFFP ; (2) des études effectuées il y a une dizaine d’années par le CERFO pour le compte du MFFP, qui avaient permis de produire des versions préliminaires de stratégies d’aménagement pour ces 2 espèces ; (3) la mise à jour des connaissances provenant à la fois de la littérature et d’experts consultés et (4) les résultats d’analyses de rendement (SaMARE-Artémis) et financières (MÉRIS), qui ont permis de comparer plusieurs scénarios sylvicoles types et d’en évaluer la rentabilité.

Une typologie des cas rencontrés sur le territoire de l’Outaouais (familles de peuplements forestiers auxquelles s’appliqueront les stratégies développées) a également été produite et a permis de faire ressortir 13 cas regroupés autour des groupes suivants : (1) les jeunes peuplements denses (densité de couvert >= 55%) ; (2) les jeunes peuplements ouverts (< 55%) ; (3) les peuplements matures denses ; (4) les peuplements matures ouverts ; (5) les peuplements matures biétagés ouverts avec un étage inférieur fermé ou ouvert (6).

Pour chaque cas, une famille de scénarios est proposée.

Plusieurs éléments clés ressortent des analyses financières : le chêne rouge et le pin blanc sont très intéressants économiquement, car ils ont le potentiel de produire davantage de bois de valeur (sciages et déroulages) par tige que leurs espèces compagnes telles : l’érable à sucre, l’érable rouge, le bouleau jaune ou le hêtre. La présence et la proportion en chêne et pin améliorent la valeur actualisée nette : leurs valeurs élevées sont relativement stables sur les marchés. De plus, les redevances perçues par l’État sont supérieures : elles doublent pour les tiges de 40 cm et triplent pour les tiges de 48 cm. Pour un arbre de 40 cm, la valeur du pin blanc est même 15 % plus élevée que celle du chêne rouge. Par contre, les interventions culturales nécessaires sont onéreuses. Arrivant tôt dans la vie du peuplement, elles ont un effet assez important sur la VAN (Valeur Actualisée Nette). Il serait alors intéressant de considérer une méthode de production « situative » afin de maîtriser ces coûts en se concentrant sur un nombre restreint de candidats et ne faisant rien pour le reste.

La stratégie d’aménagement forestier qui est proposée comporte quatre grands axes : (1) l’instauration d’une succession assistée pour les peuplements prêts à être récoltés, avec une présence importante de chêne rouge et de pin blanc et d’un couvert protecteur pour installer la régénération ; (2) l’accroissement rapide de la valeur sur pied pour les jeunes peuplements fermés et en pleine croissance, avec une présence importante chêne rouge et le pin blanc ; (3) la conversion de peuplements par la régénération artificielle, là où le potentiel forestier est très élevé à exceptionnel pour les espèces désirées, sous couvert ou en milieu ouvert ; (4) le maintien de la présence de ces espèces dans les peuplements dont le potentiel de croissance pour le chêne rouge et le pin blanc n’est pas optimal et leur présence limitée.

Pour la stratégie sylvicole, une sylviculture fine est de mise et les procédés de régénération en futaie régulière sont préférés. La régénération artificielle est automatique, mais devrait être toujours synchronisée avec les bonnes années semencières, pour une meilleure gestion du risque. Elle doit se faire préférablement sous couvert pour le pin blanc. Le débroussaillement est nécessaire pour l’installation du chêne rouge alors que le scarifiage est indiqué pour le pin blanc. Les travaux de dégagements hâtifs sont essentiels pour contrôler la compétition. Ceux-ci doivent être accompagnés d’élagages, de tailles de formations, suivis de dégagements par puits de lumière, d’éclaircies pré commerciales et d’un régime d’éclaircies pour la production de bois de qualité. La possibilité d’effectuer de courtes révolutions en futaie équienne pourrait être explorée. Enfin, quelques recommandations sont proposées pour la mise en œuvre, le déploiement et la recherche.

Développement de stratégies sylvicoles pour la production de peuplements résilients et tolérants constitués de chêne rouge et de pin blanc – État des connaissances. Rapport 2018-05. 29 p. + 4 annexes.

Le présent document décrit l’état des connaissances pour ce qui a trait à l’autécologie des essences et la sylviculture du chêne rouge et du pin blanc dans un contexte d’enrichissement de zones à relief de l’Outaouais. Cette revue se base sur des guides sylvicoles et des résultats d’un questionnaire adressé à des professionnels du domaine, sylviculteurs, chercheurs et industriels. Dans ce document seront explorés les effets du changement climatique sur la composition en essences des peuplements et leur état de santé pour comprendre le choix du chêne rouge et du pin blanc comme essences à utiliser pour la remise en production des peuplements dépérissants d’érable à sucre (Acer saccharum) et de hêtre à grandes feuilles (Fagus grandifolia). L’autécologie des essences sera présentée en lien avec les facteurs de stress et les itinéraires sylvicoles couramment utilisés.

La cartographie des îlots de chaleur et de fraîcheur en milieu urbain.

Depuis quelques décennies, on ne peut plus nier la réalité des changements climatiques à l’échelle mondiale. La hausse constante de la température ainsi que la présence de périodes de températures extrêmes, en particulier en été, sont d’avantages accentuées en milieu urbain, créant alors un problème affectant sérieusement les citoyens : l’effet des îlots de chaleur urbains.

Article paru dans la revue Géomatique – Volume 42 – Numéro 3 – Automne 2015.

Identification et localisation des îlots de chaleur et de fraîcheur pour tout le Québec urbain. CERFO. Technote 2013-01.

Depuis quelques décennies, on ne peut plus nier la réalité des changements climatiques à l’échelle mondiale. La hausse constante de la température (observée et projetée) ainsi que la présence de périodes de températures extrêmes, en particulier en été, accentueront vraisemblablement un problème déjà connu : l’effet des îlots de chaleur urbains. Il devient donc urgent de mettre en place des mesures pour lutter contre les effets nocifs de ces îlots de chaleur en milieu urbain et minimiser leurs impacts. Une gestion efficace de la végétation et de l’eau en milieu urbain, créant des zones de fraîcheur urbaines (ou îlots de fraîcheur), est l’une des principales solutions à ce problème. L’élaboration d’un outil permettant de localiser les îlots de chaleur et les îlots de fraîcheur, à une échelle relativement fine et pour tout le Québec urbain, devient très pertinente pour la lutte aux effets des îlots de chaleur, en plus d’être un appui à l’aménagement urbain axé sur la qualité de vie de ses habitants.

C’est dans ce contexte que l’Institut national de santé publique du Québec a confié au CERFO le mandat de développer un modèle de prédiction de la température de surface, dans le but d’identifier et de localiser les îlots de chaleur et de fraîcheur en milieu urbain.