Un premier modèle permettant de prédire la régénération forestière 5 ans après feu à partir de la composition forestière avant feu a été développé par le Consortium de recherche sur la forêt boréale commerciale il y a quelques années. Ce modèle, s’il a un taux d’efficacité de prédiction satisfaisant pour certains types de strates, présente néanmoins la faiblesse de ne prendre en considération ni l’intensité du feu, ni les conditions écologiques. À la demande de Kruger inc., il a donc été décidé de développer une seconde version, qui tiendrait compte de nouveaux paramètres explicatifs, soit l’intensité du feu et les conditions de dépôts de surface et de drainage.
Dans le cadre de cette étude, huit modèles de prédiction ont été construits pour chaque essence, à partir des données d’inventaire recueillies : 3 modèles d’intensité de feu, 4 modèles correspondant aux 4 principales conditions de dépôt-drainage présentes sur le territoire d’étude, et un modèle global, construit à partir de toutes les données d’inventaire recueillies. Une sélection des modèles présentant les meilleurs degrés d’ajustement avec les données d’inventaire (exprimé à l’aide du coefficient de corrélation R2) a ensuite été faite parmi les 8 modèles construits.
Le degré d’ajustement des différents modèles retenus varie de 13 à 55 %. De plus, sur les 20 modèles qui ont été retenus, 9 d’entre eux ont un degré d’ajustement supérieur ou égal à 25%, ce qui signifie qu’au moins un quart de la variation du stocking de la régénération est expliqué par les variables choisies (intensité du feu, combinaison de dépôt-drainage, nombre de tiges marchandes avant feu). Enfin, l’intervalle de confiance accompagnant chaque modèle de prédiction est globalement satisfaisant pour tous les modèles, à l’exception de ceux du bouleau blanc, puisqu’il est compris entre ± 10 et ± 25 %.
Certains modèles présentent néanmoins quelques limites, lorsqu’une partie non négligeable du stocking de la régénération reste encore inexpliqué. Ceci peut s’expliquer par le fait qu’il existerait d’autres variables explicatives qui n’ont pas été considérées dans cette étude, mais qui joueraient un rôle important dans le succès de la régénération après feu. Le degré de précision des données qui ont été utilisées pour décrire la composition en essences avant feu (nombre de tiges marchandes avant feu déterminé par strate regroupée à partir des fichiers Ts et Gs du MRNQ) est aussi un élément pouvant expliquer le faible degré de corrélation des modèles avec les données d’inventaire. Enfin, il est possible que le nombre des données d’inventaire de la régénération après feu qui ont servi à la construction des modèles soit, pour certains cas étudiés, insuffisant.
Les différents modèles retenus ont ensuite été appliqués à l’ensemble du territoire brûlé, dans le but de proposer deux séries d’hypothèses de compositions en essences sur un horizon d’une cinquantaine d’années. Un premier scénario considère l’évolution naturelle des peuplements, alors que le second considère l’évolution suite à des interventions de dégagement des tiges résineuses. La confrontation des cartes synthèse produites à partir des deux scénarios d’évolution permet alors de localiser les secteurs qui ont un fort potentiel résineux (peuplements résineux purs ou mélangés à dominance résineuse). Ceci représente un outil intéressant de planification des opérations de dégagement, puisqu’il sera alors possible de privilégier le dégagement des sites dont le potentiel résineux est important. Ainsi, le scénario d’évolution naturelle met en évidence, en l’absence d’opérations de dégagement des tiges résineuses, la quasi-absence, à l’échelle du territoire brûlé, de peuplements à vocation résineuse sur un horizon de 50 ans après le passage du feu. La confrontation des deux scénarios d’évolution montre par contre qu’il est possible d’accroître fortement la composante résineuse du territoire par des opérations de dégagement. En effet, le scénario avec intervention prédit que l’on pourrait augmenter la présence de peuplements dominés par des essences résineuses (peuplements résineux purs ou mélangés à dominance résineuse) sur 56% de la superficie productive brûlée. Enfin, la confrontation du scénario d’évolution sur 50 ans après dégagement avec la classification de l’image satellite 5 ans après feu confirme parfaitement la présence réelle d’un potentiel résineux sur les sites dont les prédictions sur 50 ans indiquent la présence majoritaire de tiges résineuses.