Cinq ans après le passage du feu de Parent, le bilan de la régénération indique que 68 % de la superficie est présentement occupée par des peuplements à dominance résineuse. Or, en l’absence d’intervention d’entretien de la régénération, le modèle de prédiction d’évolution naturelle sur 50 ans développé par Boulfroy et al. (2001) prédit que 93 % de la superficie sera constituée de peuplements à dominance feuillue dont 60 % en feuillu pur et 33 % en mélangé à dominance feuillue. Dans le cas de l’évolution prédite lorsque des interventions de dégagement des tiges résineuses sont réalisées sur les sites à potentiel résineux, soit 91 % du territoire, on aurait 32 % de la superficie couverte par des peuplements résineux purs et 30 % de peuplements mélangés à dominance résineuse. Seulement 38 % de la superficie serait dominée par les essences feuillues.
À moyen terme, l’objectif des bénéficiaires est de réaliser entre 1000 et 2000 hectares par année de dégagement dans les peuplements ayant un potentiel résineux situé dans les secteurs brûlés du feu de Parent. Il s’agit cependant de conditions particulières de travail puisque, dans ces secteurs, on observe la présence d’un grand nombre de tiges brûlées sur pied et une grande quantité de déchets au sol. Ces deux éléments, qui ne sont habituellement pas présents dans les opérations standards de dégagement, représentent un risque élevé pour la sécurité des travailleurs et augmentent les risques de blessures.
La présente étude constitue un projet en deux phases qui vise à préserver la part de vocation résineuse du feu de Parent par l’application d’interventions adaptées au territoire brûlé. Cette étude a pour objectifs généraux : (1) de déterminer quelles sont les méthodes de dégagement les plus sécuritaires et les plus rentables, (2) d’installer un dispositif de suivi de manière à valider les hypothèses d’évolution des peuplements selon les scénarios d’évolution naturelle et d’évolution des tiges résineuses dégagées .
Étant donné la nature dangereuse des travaux, il n’est pas possible d’avoir recours à des opérations manuelles sans opérations mécaniques préalables facilitant l’accès au site telles que des interventions de nettoiement. Deux méthodes de nettoiement ont été mises à l’essai lors de la phase 1 du présent projet. L’abattage de déblaiement réalisé par une abatteuse-groupeuse dans le secteur Wabash du feu de Parent, est un traitement peu perturbateur qui permet de préserver la régénération dans le cas où celle-ci est moins abondante. Cette intervention se réalise à un coût raisonnable (350 $/ha pour 1250 tiges marchandes brûlées sur pied) en vue de la préparation des sites à un dégagement manuel de la régénération naturelle. La seconde méthode proposée dans le secteur Greening, le dépressage mécanique par bandes, réalisé à l’aide de la débroussailleuse Nokamic, s’applique dans le cas de régénération très abondante et permet à la fois de libérer l’accès au site et de diminuer le nombre de tiges à couper. Cette intervention représente un coût moyen estimé à 325 $/ha et facilitera l’opération d’éclaircie précommerciale subséquente.
Les deux traitements ont été réalisés dans le cadre d’un dispositif expérimental qui permet de suivre l’efficacité des différents travaux réalisés, ainsi que l’effet de ces derniers sur la régénération en place et l’encombrement visuel. Les deux traitements ont semblé efficaces pour faciliter l’accès au site pour un traitement de dégagement ou d’éclaircie précommerciale subséquent. Dans le secteur d’abattage de déblaiement (Wabash), la régénération en épinette noire est admissible au traitement de dégagement mécanique afin de réduire la densité du peuplement (dépressage) et, surtout, de libérer la régénération résineuse de l’envahissement par les espèces de compétition (nettoiement). Quant au secteur de dépressage par bandes (Greening), la hauteur et la densité des pins gris rend admissible le traitement par l’éclaircie précommerciale afin d’en réduire la densité (dépressage seulement). Les dispositifs de Wabash et Greening permettront, dans le cadre du deuxième volet de ce projet, de mesurer l’impact réel des travaux de nettoiement sur les opérations manuelles subséquentes, de manière à évaluer l’intérêt pratique et financier du traitement de nettoiement préalable. De plus, ces dispositifs permettront le suivi de l’évolution de la régénération.
De plus, une planification sommaire du réseau routier dans le feu de Parent est proposée, dans le but de rendre accessible la plus grande concentration de sites qui, après des opérations de dégagement, contiendront le plus de tiges d’avenir résineuses. Cette planification est basée sur une classification des peuplements forestiers selon 3 catégories, en fonction de leur composition en essences dans un horizon de 50 ans si des opérations de dégagement sont réalisées :
-Retour prédit en peuplements résineux purs : priorité I
-Retour prédit en peuplements mélangés à dominance résineuse : priorité II
-Retour prédit en peuplements mélangés à dominance feuillue : priorité III
Enfin, la comparaison des rendements du scénario sans dégagement avec le scénario avec dégagement dans le feu de Parent permet de démontrer que la réalisation d’un dégagement a un impact important sur les rendements en SEPM alors qu’il a très peu d’effet sur le rendement total ou sur l’âge à maturité. Le dégagement du feu de Parent amènerait un investissement majeur d’une trentaine de millions de dollars pour un gain supplémentaire en volume résineux sur pied à maturité d’un peu plus de 2 000 000 m3 . Basée sur la valeur marchande des bois sur pied, la différence entre la valeur du SEPM et du peuplier multiplié par le gain en volume en SEPM suite à un dégagement équivaut à l’investissement occasionné par ce même traitement en dollars d’aujourd’hui.