Identification et caractérisation des îlots de fraîcheur urbains. CERFO. Rapport PART 2011A058 (2012-19). 33 pages + 1 annexe.

Rapport_final_CERFO_2012-19.pdf

Selon l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal, des épisodes de chaleur accablante peuvent provoquer différents problèmes de santé, surtout chez les personnes âgées et les jeunes enfants âgés de 0 à 4 ans. Ces épisodes surviennent plus fréquemment en milieu urbain en raison de la présence d’îlots de chaleur et seront plus fréquents dans un contexte de changements climatiques [1].

Un îlot de chaleur urbain se définit comme une zone en milieu urbain où la différence de température de surface1 observée est supérieure à la température des zones rurales environnantes pour la même période. En effet, en milieu urbain, la densification de la population et l’urbanisation ont pour effet d’accroître la proportion de surfaces minéralisées (ex. : asphalte, béton, etc.) qui absorbent la chaleur aux dépends des surfaces végétalisées (espaces verts).

L’occupation du territoire et les matériaux qui le composent ont un impact direct sur la température de surface. Certains auteurs ont démontré que les températures des centres urbains peuvent atteindre jusqu’à 12°C de plus que celles des régions limitrophes [2]. Cependant, plusieurs études ont démontré qu’à mesure que le nombre d’arbres dans un secteur augmente, la température de l’air ambiant diminue plus rapidement [3] [4] [5] [6] [7]. La température maximale de l’air ambiant dans les milieux urbanisés peut être réduite d’environ 0,04 à 0,2°C par pourcentage additionnel de couverture arborée [8]. Cet intervalle de valeurs s’explique par le choix des essences d’arbres et leurs caractéristiques respectives (taille, densité du couvert, etc.). Il est possible d’atteindre une moyenne d’environ 1°C de réduction par 10 % de couverture arborescente jusqu’à concurrence d’environ 7°C [9] [10] [11] [12].

À l’échelle de l’arbre individuel, il est démontré que certains arbres situés à des endroits stratégiques peuvent avoir un rôle non négligeable sur le bilan thermique d’un secteur. Par exemple, l’ombre d’arbres individuels ou de petits groupes d’arbres sur des surfaces gazonnées permet de réduire la température maximale de l’air ambiant d’environ 0,7 à 1,3°C par rapport à des zones ouvertes [8]. De plus, certains scientifiques rapportent qu’un arbre mature (ex. : érable de 75 ans et de 30 cm de diamètre) transpirant 450 litres d’eau par jour a un effet refroidissant équivalant à celui de cinq climatiseurs fonctionnant 20 heures par jour [13] [14]. Grâce à ce processus, un arbre individuel crée, sous son ombre, une zone où la température peut être diminuée d’environ 0,7 à 1,3°C [15].

Depuis 2009, l’Institut national de Santé publique du Québec (INSPQ) [16] s’est penché sur la problématique des îlots de chaleur urbains afin de se prémunir d’un cadre d’intervention pour protéger les populations à risque lors de températures excessives (canicules). Pour ce faire, un portrait des principaux îlots de chaleur présents dans les centres urbanisés du Québec a été produit par le CERFO [17] pour l’INSPQ. Cet institut a produit une cartographie de ces îlots et la rend disponible sur le Web .

Cette carte permet aux décideurs d’orienter des plans d’action visant à réduire les risques pour la santé de la population vulnérable lors d’épisodes de chaleur accablante.

Or, la résolution spatiale de cette carte (20 mètres) ne permet pas de considérer le pouvoir rafraîchissant de certains arbres ou d’agglomérations d’arbres. Elle ne permet pas non plus d’identifier avec précision des zones végétalisées urbaines où la température se rapproche des zones rurales environnantes. Ces « îlots de fraîcheur » ne peuvent donc pas être localisés ni caractérisés afin de connaître leur contribution au rafraîchissement local.

Par ailleurs, une firme de consultants en design urbain et aménagement du territoire nous a indiqué que la conservation ou l’implantation d’îlots de fraîcheur fait dorénavant partie du coffre à outils des urbanistes. Il s’agit de prioriser la préservation des zones où la présence de végétation empêche la formation d’îlots de chaleur ou de végétaliser des zones près des îlots de chaleur afin d’en réduire les impacts. Il y a donc un besoin d’identifier les îlots de fraîcheur et de cibler les endroits favorables à l’implantation et au maintien de ceux-ci.

C’est dans ce contexte que le CERFO a réalisé, dans le cadre du programme PART, un projet conciliant la foresterie urbaine et la santé publique. Pour ce faire, une méthode a été développée pour identifier les îlots de fraîcheur par imagerie satellitaire, et ce, au mètre près. Les résultats de cette méthode permettront, entre autres, aux firmes spécialisées en aménagement du territoire, en urbanisme et en design urbain de disposer d’un outil plus détaillé pour identifier, protéger et implanter des îlots de fraîcheur en milieu urbain.

Bien que la carte des îlots de fraîcheur/chaleur ait été produite à l’échelle de 20 m [17], il n’y a, à notre connaissance, que très peu de travaux qui se sont attardés à identifier des îlots de fraîcheur à une échelle fine et à les caractériser en termes forestiers. Le caractère novateur du projet se retrouve donc dans le fait de fournir à des firmes de design urbain une méthode pour identifier des îlots de fraîcheur existants et les caractériser de manière forestière. Ces caractéristiques serviront à prioriser les boisés à conserver. Dans le cas de l’implantation d’un nouveau boisé, elles serviront de cibles à atteindre pour que le boisé serve d’îlot de fraîcheur.