Rapport_final_CERFO_2014-12.pdf
Le secteur du lac des Neiges situé dans la réserve faunique des Laurentides est un lieu de fréquentation intensive par la harde de caribous de Charlevoix, espèce qui est actuellement désignée comme une « espèce vulnérable » par le gouvernement du Québec. La perte d’habitats disponibles pour le caribou est entre autres occasionnée par la fragmentation importante du territoire, liée à la densité élevée du réseau de chemins forestiers. De plus, la forte présence de l’ours noir, identifié comme le principal prédateur des faons du caribou dans cette région, serait également associée au réseau dense de chemins, combiné à la présence majoritaire de peuplements jeunes ou en régénération. Enfin, ce réseau routier dense coûte cher à entretenir par les différents utilisateurs du secteur et sa dégradation génère aussi d’autres problèmes environnementaux. Dans ce contexte, il devient urgent d’identifier des moyens qui permettraient d’optimiser la gestion du réseau routier, afin d’augmenter la rentabilité des opérations forestières de Scierie Leduc, principal industriel forestier qui s’approvisionne sur le territoire et de diminuer les problèmes environnementaux liés à ce réseau, notamment la perte d’habitats pour le caribou forestier.
Ce projet a permis de réaliser dans un premier temps un portrait de l’état des chemins forestiers dans le secteur du lac des Neiges. Ce portrait repose sur l’inventaire et l’analyse de 55 tronçons de chemins, répartis selon l’âge et la classe des chemins. Il apparaît que le niveau de compaction de la surface de roulement varie en fonction de la classe des chemins, mais reste toujours trop élevé, entraînant alors la nécessité de réaliser des travaux de préparation de terrain préalablement à une remise en production éventuelle des chemins. De plus, quels que soient l’âge et la classe des chemins, les gaules résineuses et feuillues sont insuffisamment présentes (< 33 % pour les résineux et < 14 % pour les feuillus) pour assurer à court terme la fermeture naturelle de la surface de roulement. Dans l’emprise, les vieux chemins (20-25 ans) ont une présence de gaules résineuses suffisante (≈60 %) et peu de compétition feuillue nuit à cette régénération. Dans les chemins plus jeunes, la présence des gaules est insuffisante (< 35 %) pour assurer la fermeture naturelle de l’emprise. Les microsites de plantation ne manquent par contre pas (> 63 %).
Une synthèse de la littérature disponible a ensuite permis d’identifier les modalités de fermeture de chemins qui sont déjà été expérimentées au Canada et ailleurs dans le monde (abandon naturel, blocage de l’accès, modification des infrastructures…), ainsi que les méthodes d’installation de traverses de cours d’eau temporaires. Cette synthèse fait le bilan, pour chaque modalité, des objectifs poursuivis, de ses avantages, ses inconvénients et dresse une évaluation sommaire des coûts de mise en œuvre sur le terrain.
Finalement, des solutions potentielles de fermeture de chemins ont été proposées pour chaque situation observée sur le territoire d’étude. La remise en production en essences résineuse avec au préalable la décompaction de la surface de roulement est la solution à privilégier. Des mesures de blocage de l’accès sont également recommandées pour à la fois protéger les travaux de plantation réalisés et limiter le dérangement des caribous. Aucune mesure spécifique de lutte contre l’enfeuillement ne s’avère par contre nécessaire en bordure des chemins. Une analyse des coûts de fermeture d’un kilomètre de chemin selon 6 scénarios possibles dans le secteur à l’étude a aussi été présentée. Il en est ressorti qu’en fonction des conditions rencontrées, ces coûts varient entre 12 050 $ et 23 750 $/km de chemin.
Étant donné que les solutions proposées reposent sur des essais réalisés ailleurs qu’au Québec, dans des conditions pouvant être fort différentes, il serait très pertinent de tester sur le terrain certaines des modalités de fermeture de chemins qui sont recommandées. Ces expérimentations permettraient de développer une méthode adaptée au contexte régional et de documenter les coûts réels de mise en œuvre, dans le but d’évaluer l’impact de ces mesures sur la rentabilité des opérations forestières. De plus, une modélisation de l’évolution du taux de perturbation suite aux travaux de fermeture de chemins envisagés permettrait d’évaluer les impacts à long terme des mesures de fermeture de chemins sur l’autosuffisance de la population de caribous de Charlevoix.